élèves de l’école de Souk Ahras - Archives privées

Gabriel Mifsud, né en 1926 en Algérie, est instituteur. En 1951, il est nommé à Souk Ahras près de la frontière tunisienne, où va être déplacée une importante population algérienne pendant la guerre. Il s'engage dans une solidarité active auprès de ces familles qui vivent dans des conditions d'extrême précarité. Évacué par l'armée en 1962, il revient aussitôt après l'indépendance pour travailler à la reconstruction du système éducatif local et devient maire adjoint de Souk Ahras jusqu'en 1971.

Gabriel Mifsud explique aux élèves sa position d'instituteur Français d'Algérie, engagé dans une solidarité sociale auprès des Algérien.nes pendant la guerre.

Gabriel Mifsud et les élèves de première ES, lycée La Martinière Duchère, Lyon

Biographie
Gabriel Mifsud est né en 1926 à Annaba dans une famille pied-noire d’origine maltaise qui lui transmet les valeurs du catholicisme social. Il apprend l’arabe au lycée et se perfectionne dans la langue lors de son premier poste dans le Sud de l’Algérie. Durant toute sa jeunesse, il est scout et participe à de nombreux camps inter-religieux où il lie des amitiés avec de jeunes musulmans. A 19 ans et alors chef d’un camp scout, il participe aux célébrations du 8 mai 1945 à Guelma. Il est témoin de la répression et des violences, mais aussi des gestes de sauvegarde et de solidarité entre les colons et leurs employés algériens et inversement. Au début de la guerre, il est instituteur à Souk Ahras, ville de 20 000 habitants à 60 km de la frontière tunisienne. Du fait de cette proximité et de l’établissement de la ligne Morice, une forte population est déplacée et se réfugie aux abords de Souk Ahras. Tout comme sa femme, il est alors instituteur dans une école pour Français.es musulman.es et beaucoup de ses élèves vivent dans les bidonvilles à l’extérieur de la ville. Il crée alors, avec des prêtres, l’Entr’Aide Fraternelle, dans une optique inter-culturelle, qui se démarque du Secours Catholique. L’association distribue des vivres. Cette solidarité envers les Algérien.nes est mal acceptée par de nombreux Français.es d’Algérie et les Mifsud se retrouvent au ban de la communauté et renforcent ainsi leurs liens avec la population algérienne.
Tout au long de la guerre, Gabriel Mifsud envoie des rapports à la commission aux droits de l’homme en Algérie créée par De Gaulle et dirigée par Robert de la Vignette afin d’alerter le gouvernement sur l’usage de la torture. En mars 1962, les Mifsud sont menacés de mort par l’OAS, et évacués en France par l’armée. Ils arrivent donc à Nice puis partent pour la Normandie où l’inspecteur d’académie leur refuse un poste du fait de leurs engagements. Il faut l’intervention de Robert de la Vignette pour que les Mifsud puissent travailler.
Dès le 21 juillet 1962, toute la famille rentre en Algérie pour aider à la reconstruction du pays. Les habitant.es demandent à Gabriel Mifsud d’être maire-adjoint de Souk Ahras et de préparer la rentrée scolaire de septembre 1962. Afin d’accueillir tous les enfants, Gabriel demande à l’armée une caserne pour la transformer en école. Ce principe va être généralisé sous Boumediene. En 1964, Gabriel est nommé directeur de l’école d’application d’Annaba où il forme les futurs instituteurs. Il y travaille jusqu’en 1971 où l’Etat décide d’algérianiser l’enseignement primaire. Il refuse alors le régime spécial qui lui est proposé et qui lui permettrait d’enseigner en français. Le couple quitte l’Algérie pour Lyon et retrouve ses enfants qui y font leurs études. Il devient instituteur à la Croix-Rousse. Il prend sa retraite en 1981, fait du soutien scolaire et s’engage dans la CIMADE. .