Rachid Bensot naît en Algérie dans une famille paysanne de la région d’Alger alors que la guerre d’indépendance s’achève. Lorsqu’il est informé des massacres qui accompagnent la prise du pouvoir par le
FLN, son père, engagé dans les harkis, décide de fuir le pays en emmenant avec lui toute sa famille.
Débarqués à Marseille, les Bensot sont d’abord dirigés vers le camp de transit de Rivesaltes, (Pyrénées Orientales) où ils passent huit mois sous des tentes. Ils sont ensuite affectés, ainsi qu’une quarantaine d’autres familles, au hameau de forestage de Brogilum, situé sur la commune de Fuveau, à l’ouest d’Aix-en-Provence. Les hommes en âge de travailler sont employés par l’ONF (Office national des forêts). Ils effectuent des tâches de débroussaillage et de bûcheronnage. Les familles sont hébergées dans des baraquements en préfabriqué, exigus et rapidement insalubres. Il faut attendre 1976 pour que ces baraquements soient rasés et remplacés par des constructions en dur qui forment la « cité Brogilum ».
De ces années, Rachid Bensot se souvient surtout de l’isolement géographique et social des harkis : scolarisation dans le hameau et non avec les autres enfants de la commune, embauches impossibles en dehors de l’ONF, hostilité allant jusqu’à la violence physique à l’encontre des harkis dans le village.
Il note que c’est la génération des enfants de harkis qui a lutté pour sortir de la marginalisation et pour la reconnaissance du parcours des parents. Rachid Bensot s’est ainsi impliqué dans les manifestations de 1991 et 2001 qui ont pris la forme de barrages routiers. Vingt-deux ans après la mort de de son père, devenu chauffeur routier et père de famille, il réside toujours à Fuveau. Déçu par les promesses des élus qu’il juge non-tenues, il s’implique aujourd’hui dans les revendications de rachat des maisons du hameau par les harkis et leurs enfants.