André Montagne est né en septembre 1936 dans une famille paysanne des Monts du Lyonnais. Il passe le certificat d’études primaires puis commence à travailler à 14 ans dans la ferme familiale. Il n’a ni instruction politique, ni syndicale lorsqu’il est appelé sous les drapeaux en janvier 1957. Il reste d’abord 14 mois, en Allemagne, pour une formation militaire de base qui lui permet de monter en grade. Il devient
ainsi sergent sans passer de concours. En mars 1958, il est envoyé pour une «
mission de pacification » de l’autre côté de la Méditerranée.
C’est pourtant dans une guerre qu’il se retrouve plongé à son arrivée en Algérie. Il est d’abord nommé dans une
SAS (Section administrative spécialisée) avec 4 hommes sous ses ordres qui montent la garde, nuit et jour, dans un bâtiment. Le 31 mai, envoyé en mission, il est engagé dans un premier combat. Quelques jours plus tard il est témoin de la mort de deux camarades. Les missions s’enchaînent dessinant un quotidien où il s’efforce de préserver tant bien que mal son intégrité physique et morale. Ses supérieurs incitent à des comportements indignes. Sa peur d’être tué s’accroît au fil du temps et est à son comble lorsqu’il est prolongé pour un mois supplémentaire après avoir déjà effectué 27 mois de service.
A son retour à la vie civile, il se marie le 5 juillet 1962
(qu’il remarque être la date de l’indépendance de l’Algérie) et s’applique à oublier cette guerre.
Il revient tardivement sur son expérience algérienne, dans les années 80. La lecture du livre de Jean Ziegler
Retournez les fusils ! est un choc à partir duquel il recompose sa mémoire du conflit. Il découvre alors les massacres de Sétif, Guelma et Kherrata du 8 mai 1945, ceux de
la répression française à Madagascar en 1947, et prend conscience de son ignorance quant aux enjeux de la guerre dans laquelle il a été plongé. Il n’a de cesse depuis de questionner cette mémoire, de l’élaborer, de tenter de lui donner sens et de la partager. Il ne se reconnaît dans aucune association d’anciens combattants.