Prison Montluc - Archives privées - Duhamel

Agée d'à peine 20 ans quand commence la guerre d’indépendance algérienne, Claudie Duhamel est étudiante en histoire à Aix-en Provence. Elle milite à l’Union des étudiants communistes et participe à des actions pour dénoncer les abus de la colonisation. En janvier 1960, contactée par Nicole Cadieu, elle abandonne ses études d’histoire, rejoint Lyon et devient permanente du réseau Boëglin.
Elle est arrêtée, condamnée lors d'un procès largement médiatisé et emprisonnée à Montluc.
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Claudie Duhamel explique les raisons de son engagement aux côtés des militants algériens de Lyon et en décrit les différentes étapes.

Biographie
Née en 1937, Claudie Duhamel est étudiante à Aix-en-Provence au moment où éclate la guerre d’indépendance algérienne. Militante à l’Union des étudiantes communistes en 1957, elle participe alors à des actions de distribution de tracts et de placardages d’affiches afin de dénoncer les abus de la situation coloniale.
Les affrontements entre les étudiant.es en sciences humaines, majoritairement de gauche, et les étudiant.es en droit qui défendent l’Algérie française sont nombreux et violents. Mais Claudie Duhamel a défendu des idées anticoloniales avant même le début de l’insurrection algérienne. Ayant passé une grande partie de son enfance au Maroc, elle y a découvert les injustices et les abus des colons, qui l’ont révoltée. Adolescente, elle est fortement sensibilisée aux revendications des nationalistes marocains.
Le déclic se produit vers 1959, quand elle assiste à une « ratonnade » dans le métro parisien. De retour à Aix-en-Provence, elle décide de mener des actions plus « concrètes » que la distribution de tracts. Elle est alors contactée par Nicole Brochier, qui la met en relation avec Jean-Marie Boeglin. Ce dernier lui conseille de quitter la région aixoise pour Lyon,  où elle est moins connue et où  habite sa mère. En janvier 1960, elle abandonne alors ses études d’histoire. Guidée par des souvenirs de la Résistance – entre l’âge de trois et huit ans, elle a été envoyée « en pension, dans des milieux de résistance », dans les Pyrénées, avec ses frères et sœur,  – elle s’engage dans la lutte pour l’indépendance aux côtés des Algérien.nes, en devenant permanente du réseau de soutien métropolitain au FLN.
Elle y est active en tant qu’agente de liaison – sous le pseudonyme de « Catherine » – et assume de nombreuses tâches : transport de fonds et de documents, distribution du journal clandestin El Moujahid, liaison entre les différents membres des réseaux français et algériens, « démarchage » des Français.es susceptibles d’aider les Algérien.nes, etc.  A l’été 1960, elle se sent surveillée  et le signale à son chef de réseau qui ne la croit pas et la renvoie à son « émotivité féminine ». En novembre 1960, elle est arrêtée lors d’un grand coup de filet de la DST qui démantèle le réseau Boeglin.
Elle est condamnée à dix ans de prison pour atteinte à l’intégrité du territoire national en avril 1961, en même  temps que d’autres membres du réseau, et de Tahar Temzi, chef de la Wilaya. Face à leurs juges militaires, Claudie et d’autres accusés font de leur procès une tribune contre le colonialisme, bien relayée par la presse.
En novembre 1961, elle rejoint le mouvement national de grève de la faim déclenché par les détenu.es algérien.nes, qui demandent le statut de détenus politiques. La grève dure plus de trois semaines. Claudie Duhamel est transférée avec Nicole Brochier à l’hôpital psychiatrique du Vinatier, où le médecin diagnostique une « anorexie mentale ». 
A l’issue de cette grève, la condition des détenu.es s’améliore considérablement. Les détenu.es peuvent ainsi recevoir la presse et ont la possibilité de poursuivre leurs études. A sa sortie de prison, en 1963, Claudie Duhamel est contrainte de se cacher pour échapper aux menaces de l’OAS : un voyage en Algérie est organisé par le FLN, auquel elle prend part avec Jean-Jacques Brochier. Elle est déçue par l’attitude des « Pieds-rouges », qui organisent de somptueuses réceptions alors que la majorité de la population algérienne subit encore la misère. Plus encore, elle est choquée par la condition des Algériennes qui, malgré les risques qu’elles ont encourus pendant la guerre d’indépendance, sont cantonnées à la sphère privée et ne peuvent participer aux réunions politiques. Ce faisant, elles sont exclues du processus de reconstruction de la nation algérienne.  Pour ces raisons, Claudie décide de ne pas rester en Algérie et regagne la France, où elle se marie en 1964. Elle continue de militer à son retour.  Elle rejoint le Parti communiste, où elle participe notamment à de nombreuses actions sociales, concernant le logement.

Archives
Photos de détention

Ces photos sont extraites d’un cahier qui appartient à Claudie Duhamel et à Nicole Cadieu. Elles sont parfois difficiles à différencier l’une de l’autre. Les clichés ont été pris grâce à un appareil photo que le médecin des prisons, le docteur Mégard leur a donné. Pris à l’intérieur, ils ont servi à illustrer la campagne initiée par le Secours populaire pour leur libération. A partir du 19 novembre 1961, les deux femmes bénéficient du régime pénitentiaire spécial qui s’applique aux détenu.es pour des faits en lien avec « les événements d’Algérie ». Elles peuvent ainsi poursuivre leurs études. Elles sont aussi autorisées à s’occuper des chats de la prison et à faire des plantations dans la cour.

Pièces administratives, traces du parcours en justice et en détention - Archives privées Claudie Duhamel

32914Régime des détenus de catégorie A, courrier du 19 novembre 1961 du garde des Sceaux, 6 pages 

Campagne de soutien pour la libération de claudie Duhamel, Nicole Brochier, Gérard Marliot et Michel Bachelet. Lancée par le secours populaire en novembre 1962, cette campagne rassemble très largement à gauche.

32914Magazine – Secours populaire – La Défense – juillet 1963
32914Magazine – Secours populaire – La Défense – août 1963
32914Magazine – Secours populaire – La Défense – décembre 1963

  

Archives presse

Le.Monde-8/04/1961-Archives.privées-Duhamel