Sbah Berbagui est originaire d’El Ouricia, un petit village de la wilaya de Sétif.
Il grandit dans le petit hameau de Oued-el-Cheir (Rivière de l’orge) en compagnie de sa mère, son frère et ses deux sœurs. Orphelin de père, il vit dans la pauvreté. Sa mère fait le ménage pour l’instituteur français du village, et il n’est pas scolarisé. Dès 8 ans, il travaille comme berger dans les champs de Français d’Algérie. Pour cette besogne, il perçoit une faible rémunération en liquide et en nature (céréales).
Il s’implique dans la guerre d’indépendance algérienne après avoir subi des interrogatoires poussés et des tortures : attaché, on le force à ingurgiter une quantité importante d’eau mélangée à du grésil jusqu’à la suffocation. Il reste dix jours dans une prison à subir des interrogatoires auxquels il ne peut apporter réponse. On l’envoie ensuite travailler pour la construction de routes.
Il rejoint le maquis de Texenna et les forces de l’
ALN quelques mois après sa libération.
Ses papiers sont détruits afin d’éviter qu’il soit identifié. Il est assigné aux tâches réservées aux plus jeunes : fabrication de baraques et de garnisons, cuisine, apprentissage du combat, sans jamais avoir la responsabilité d’une arme. Son quotidien dans le maquis est marqué par la peur des attaques et la recherche de cachettes dans la forêt. Les combattants peuvent alors compter sur la solidarité des habitants qui leur apportent des vivres.
En juillet 1959, le groupe de Sbah Berbagui, encerclé et affamé, se retrouve au cœur des grandes manœuvres du plan Challe. Un groupe de 700 personnes ouvre une brèche et tente de prendre la fuite. Ils sont talonnés par l’armée française, dont les effectifs sont multipliés, avec des frappes de plus en plus violentes. Cernés dans une forêt, ils subissent un terrible bombardement au
napalm. Sur les 700 du départ, ce sont près de 300 personnes qui sont tuées au cours de cette seule opération. Sbah Berbagui fait partie d’un petit groupe qui réussit à s’échapper et à rejoindre Djebel el Halfa, point de ralliement du
FLN.
Après la fin de l’opération Challe, Sbah Berbagui reprend la route de son village natal, à pied. Craignant les délations et les représailles, il vit dans la clandestinité. Malgré le risque, il décide de refaire ses papiers d’identité à la mairie : une personne sans papiers était immédiatement identifiée comme membre du FLN et dénoncée.
Ayant réussi à récupérer des papiers d’état civil français, il rejoint Metz en juin 1961, sur invitation de son frère immigré en France, pour occuper un emploi d’aide maçon. Il est aussitôt sollicité pour s’engager dans le FLN et devient collecteur de fonds.
En août 1962, après la proclamation de l’indépendance, il rentre en Algérie mais ne peut obtenir de carte de combattant. On l’accuse d’avoir quitté son pays pour la France en pleine guerre. Il renonce à la redemander par la suite. Il déménage alors pour Lyon où sa mère le rejoint en 1967. En 1968, il se marie avec une jeune fille de son village et fait une demande de regroupement familial. Sa femme le rejoint en 1969. Ils ont six enfants. Sbah Berbagui occupe alors diverses activités professionnelles dans la grande distribution et comme cantonnier pour la Communauté urbaine de Lyon , jusqu’à sa retraite en 2000.